Discours de Jonathan Hayoun, président de l’UEJF lors de la commémoration du génocide des Tutsi au Rwanda du 7 avril 2013

Voici ci-dessous le discours prononcé par Jonathan Hayoun, le président de l’UEJF lors de la commémoration du génocide des Tutsi au Rwanda qui s’est tenue le 7 avril au Mur pour la Paix :

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Je suis comme chaque année très ému d être là.
Je me tiens à vos cotés aujourd’hui parce que l’UEJF, Union des Étudiants Juifs de France a été crée au lendemain de la Shoah pour venir en aide aux jeunes rescapés des camps de la mort.

Je me tiens à vos côtés parce qu il y a six ans j’étais au Rwanda dans un voyage où Benjamin Abtan, alors Président de l’UEJF, s’est engagé, dans un essentiel « dialogue des mémoires », à ce que nous commémorions le génocide des Tutsi chaque année en France .

Je me tiens à vos cotés comme d’autres se tiennent à nos cotés en ce jour particulier qui est aussi celui de la commémoration de Yom Hashoah.

Le Dialogue des Mémoires, réponse à la « concurrence victimaire », nouvel avatar du racisme, est la pour nous permettre encore mieux de nous appréhender les uns et les autres à travers nos histoires. Il nous enjoint à tirer des leçons pour l’humanité.

19 ans après le début du génocide des Tutsi au Rwanda qui a fait un million de victimes en 90 jours, nous pouvons nous demander ce que nous disons et ce que nous faisons en France au sujet de cette tragédie.

Certes, la rhétorique négationniste du double génocide a disparu des discours politiques officiels. Certes, il y a trois ans le Président de la République s est rendu au Rwanda tournant une page importante. Certes, dans quelques jours, un génocidaire sera jugé pour la première fois en France.
Pour autant le chemin qui nous reste à parcourir est encore long. Il doit passer par une exigence de vérité et de justice. De vérité, parce que nous le savons assurément, certains Français portent une part de responsabilité dans le génocide de 1994. Ces français, au plus haut niveau de l’appareil d’Etat, portent une responsabilité indirecte au moins, puisque c’est sous ses ordres que l’armée française a formé pendant 4 ans les militaires des forces armées rwandaises qui deviendront d’avril à juin 94, l’une des principales forces d’exécution du génocide.

De vérité donc, mais de justice également. Et dans notre pays, résident encore plusieurs dizaines de présumés génocidaires. A Gisors, à Annecy, à Toulouse, à Mayotte et ailleurs. Et nous espérons que lorsque les tribunaux français auront la charge de les juger, les procès tels que celui de jeudi prochain se multiplieront. De justice toujours parce que nous nous demandons comment accepter que nos tribunaux aient toléré qu’on oblige des rescapés à écouter dans la bouche de Pierre Péan la même rhétorique haineuse que celle qui coûta la vie à un million des leurs ?

Comment accepter que les thèses négationnistes portées par des français renforcent le négationnisme existant en Afrique.

Ce 7 avril, comme chaque année, nous nous réunissons devant le Mur Pour la Paix pour cette commémoration. Il n’y a toujours pas d’espace consacrée pour nous retrouver. Alors comme chaque année, nous appellons les pouvoirs publics à consacrer enfin un lieu de mémoire au génocide des tutsi dans Paris.

Le dernier génocide du XXème siècle doit rester présent à l’esprit de tous, et il nous oblige à l’existence de cet espace symbolique. Depuis de nombreuses années, les victimes rescapées et leurs proches réclament inlassablement un lieu de mémoire. Il nous faut leur répondre. Non pas simplement pour accorder aux rescapés un endroit de recueillement, mais aussi parce que nous, Français, avons le devoir de mémoire de cette tragédie. Nous ne connaissons que trop bien la dimension universelle du processus génocidaire pour faire l’erreur de renvoyer les survivants à leur propre histoire. Et c’est pourquoi nous sommes à vos cotés.

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