Intervention de militants de l’UEJF à l’exposition «Hamas» d’Angoulême.

Intervention de militants de l’UEJF à l’exposition «Hamas» d’Angoulême.

Depuis le 10 avril, Frédéric Sautereau expose, dans une salle prêtée par la mairie d’Angoulême, une enquête-photo sobrement intitulée «Hamas». A l’occasion du vernissage de l’exposition, une conférence-débat avec le journaliste-photographe avait lieu mercredi soir. Interpellés par cette exposition, trois militants de l’UEJF ont décidé de faire le déplacement pour intervenir durant le débat  avec M. Sautereau et le public de l’exposition en apportant également des tracts rappelant la charte du Hamas.

La salle était pleine, et comptait environ une centaine de personnes. Le débat fut modéré par un représentant du collectif Charente Palestine Solidarité, laquelle parraine l’exposition. L’Union Juive Française pour la Paix (UJFP), un groupe de Juifs antisionistes, était également représentée. Inquiétée par la tournure des événements, l’Association des Juifs d’Angoulême (AJA) a souhaité participer au débat.

Dans un premier temps, nous écoutons M. Sautereau qui nous explique sa démarche. Il s’est rendu à Gaza en tant que photo-reporters pour des séjours courts, et a rassemblé une série de clichés portant sur le Hamas, et son activité administrative et sociale auprès de la population palestinienne.  Sans pour autant tenir un discours pro-israélien, il ne manque pas de qualifier le Hamas d’organisation terroriste et islamiste. Le Hamas, explique-t-il, a recours aux attentats suicides et à l’envoi de roquettes Qassam sur les populations civiles. Le photographe défend l’engagement de discussions avec le Hamas, arguant que cette organisation est désormais un acteur incontournable de la région, et que le plus sage serait de négocier avec lui la reconnaissance d’Israël et l’arrêt des violences.

L’exposition laisse tout de même un fort sentiment de malaise qu’a très bien exprimé M. Benguigui, président de l’AJA, lors de son intervention. Les tâches administratives et sociales ne représentent qu’une partie des activités du Hamas, et en mettant l’accent sur tout ce qui n’est ni terroriste ni violent au Hamas, on ressort de l’exposition avec une image positive de ce qu’on a vu, image positive associée directement au titre de l’exposition : Hamas.

Si donc M. Sautereau arborait une attitude de bonne foi, quoiqu’un peu candide, la salle était bien plus hostile. Au fil de nos interventions, nous découvrons un véritable discours antisioniste et antisémite de la part de nombreux participants.

Débutant une série de prises de parole de notre petit groupe, Nicolas Woloszko, Trésorier de l’UEJF, aborde le sujet avec calme et recul. En rappelant le contenu de l’article 7 de la Charte du Hamas, qui appelle au meurtre des Juifs, il explique que défendre la paix implique de s’opposer au Hamas. L’UEJF, affirme son Trésorier, est une association sioniste qui promeut la paix au Proche-Orient. Au simple mot de “sioniste” un frisson parcourt la salle. Nous étions alors, et jusqu’à la fin de la soirée, désignés comme l’ennemi. Le photographe ne nie en aucun cas le contenu antisémite et génocidaire de la charte du Hamas, mais tente d’en minimiser la portée, en rappelant que la citation centrale de cet article est tirée d’un hadith de la tradition musulmane. Il faudrait donc plus y voir un élément de folklore qu’un projet politique.

Le caractère fallacieux de l’argument est immédiatement épinglé par Arié Elmaleh, Délégué National à Israël, au début de son intervention. Montrant ensuite des photos d’enfants palestiniens équipés d’armes et de ceintures d’explosifs factices, il demande au photographe si ces clichés témoignent d’une réalité du Hamas. Il est vrai que l’OLP fut en son temps considéré comme une organisation terroriste avant de connaître une certaine évolution, mais peut-on attendre que le Hamas suive la même trajectoire ? Le tollé dans la salle fut immense, comme si par ces simples questions, le militant de l’UEJF se livrait à une agression violente, à tel point qu’il fut la cible d’un projectile de papier. Interpellée à ce sujet après la fin du débat, une membre de l’organisation préféra minimiser : “on a vu pire dans certaines manifestations à Paris”. Lui demandant alors si elle voulait parler des cris d’appel à l’assassinat des Juifs, elle préféra ne rien répondre. La réponse du photographe fut plus impressionnante encore : oui, tout cela est vrai, mais il a préféré ne pas le montrer, car dans aucune zone du monde, il ne souhaite prêter son objectif à l’utilisation d’enfants à des fins de propagande. Son travail d’information en tant que journaliste s’en trouve dès lors très fortement biaisé.

André Rosevevègue, le représentant de l’UJFP, prend alors la parole, et son discours fut pour le moins édifiant. Son point central : la haine d’Israël. En réponse à l’interpellation d’Arié Elmaleh, il affirme que l’embrigadement de la jeunesse palestinienne ne parvient pas à le cheville du bourrage de crâne infligé aux enfants palestiniens. Il minimise la portée de la charte du Hamas en voulant la “replacer dans son contexte”, et en la mettant en parallèle avec la charte du Likoud qui rêve du Grand Israël. Appeler au génocide des Juifs n’est en effet pas si grave, devant la volonté d’instaurer le Grand Israël… Qui plus est, la Charte du Likoud est citée hors de son contexte : Binyamin Netanyahou, actuel Premier Ministre d’Israël et chef du Likoud, a accepté l’idée d’un État palestinien lors du discours de Bar Ilan en 2009.

Pourtant, le titre de l’exposition était bien “Hamas”, mais visiblement, pour les organisateurs et la plupart des participants, il est impossible de parler des problèmes que pose le Hamas si on ne dit pas en même temps qu’Israël pose les mêmes problèmes, et de bien plus grands encore.

C’est alors qu’une dame mimant ostensiblement tristesse et larmes naissantes interpelle les trois militants de l’UEJF, quand bien même deux d’entre eux seulement s’étaient alors exprimés :  leurs propos seraient violents et l’auraient profondément heurtée. En réalité, le mot “sioniste” ainsi que notre hostilité au Hamas lui avait suffit pour sauter à son étonnante conclusion. Elle félicita le représentant de l’UJFP qui fut selon elle bien plus raisonnable (!). déçue de voir que les jeunes délaissaient la «cause de la paix», commettant un amalgame criant entre Juifs et Israéliens. Elle fut bien entendu très chaleureusement applaudie par la salle.

Prenant en fin de débat la parole, Benjamin Haymann, Président de l’UEJF Sciences Po décide de les interpeller sur la paix qu’ils prétendent vouloir. Veulent-ils la paix avec Israël ou la paix sans Israël ? la question est bien sur rhétorique tant ils avaient clairement exprimé leur point de vue sur ce sujet, appelant sans détour à la destruction d’Israël, au moins en tant qu’État-Nation du peuple Juif. Le photographe à l’origine de l’exposition a joué finement, jamais il n’a tenu de tels propos, mais il ne manifestait en aucun cas son désaccord avec les positions adoptées par ses compagnons.

A la clôture du débat, les quelques membres de la communauté d’Angoulême sont venus remercier chaleureusement la délégation de l’UEJF. Ils ont témoigné de la reconnaissance pour être intervenu dans cette discussion houleuse, et les avoir soutenu, en se rendant sur place, face  à cette exposition biaisé, face à une mairie qui leur a semblé complaisante, et aux discours violemment antisionistes des représentants de Charente Palestine Solidarité.

Nerveusement épuisés par le fait d’avoir été hués et insultés et même attaqués pendant toute la conférence. Le pire était à venir, un pot était prévu ce qui nous a permis d’avoir des échanges avec les organisateurs et des participants, et c’est là que le vernis allait définitivement sauter pour laisser place à l’antisémitisme. “C’est les européens qui vous ont fait du mal, pourquoi vous venez nous faire chier en Palestine ?”, fut notamment une des perles que nous avons recueilli. Leur haine et leur volonté de destruction d’Israël s’est alors clairement exprimée, sans détour.

M. Sautereau fut effectivement très fin dans son attitude, mais ses amis et son exposition ont parlé pour lui. La vision d’un Hamas criminel lorsqu’il s’attaque au Fatah, mais héroïque lorsqu’il s’attaque à Israël était très fortement présente.

Enfin, on notera la position extrêmement ambivalente de la mairie d’Angoulême, qui d’un côté prétend uniquement prêter une salle sans s’occuper de ce qui se passe dedans (ce qui en soit est déjà problématique) prétendant ne pas vouloir faire de “l’ingérence dans la vie des associations”, mais tenant en même temps à féliciter le journaliste-photographe pour son “remarquable travail”.

Des félicitations qui ont un goût amer après l’étrange soirée que les militants de l’UEJF ont passé.

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