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Il y a quelques années j’ai eu la chance d’entendre le témoignage émouvant de Larissa Cain, survivante du ghetto, j’étais alors etudiant a la Sorbonne. Ses mots résonnent encore dans mon souvenir et j’ai pris la mesure alors de la force du témoignage et de la transmission. Et c’est tout naturellement son nom que je voulais tout d’abord évoquer devant vous.
"Pour nous, aujourd'hui transmettre la mémoire de la Shoah est donc un enjeu militant"
Chaque année les étudiants juifs de France se recueillent devant le monument dédié à la mémoire des combattants, résistants du ghetto de Varsovie, au 18 de la rue Mila, emblème de la révolte du ghetto.
Un groupe d’étudiants juifs s’y trouvait il y a deux jours. Ils se souviendront du combat de Mordehai Anielewisz, de Marek Edelman et de tant d’autres. C’est l’histoire de la lutte d’étudiants de leur âge. Ils ont ainsi compris que la transmission de cette page sombre de l’histoire ne peut se résumer au souvenir de mort et de la destruction mais qu’elle doit comprendre celui de ce combat et celui des 41 autres révoltes Ils se souviendront que cette génération de jeunes militants a défendu ses valeurs jusqu au bout. Cette génération qui animait la flamme du peuple juif avec tant de visions différentes. Celle de l’Hashomer Atsair, du Bund, du Betar, des mouvements sionistes, des internationalistes, des laïcs et des religieux.
Ce groupe d’étudiants juifs est à l’instant où je vous parle à Treblinka au milieu des arbres, dans cet endroit presque paisible où il ne reste rien. La où une autre révolte s’est produite, là où tant de juifs du ghetto de Varsovie furent emmenés pour y être exterminés.
Nous allons dans ces lieux devenus lieux de mémoire de la barbarie pour faire un ” travail de mémoire ” qui malheureusement est à nouveau malmené et mis en danger dans nos universités. Aujourd’hui la méconnaissance des étudiants est encore trop importante. Aujourd’hui le monde étudiant est en prise avec les messages de haine qui se sont banalisés dans notre espace public. Les discours galvanisant la concurrence des mémoires continue de sévir. La transmission de la mémoire de la Shoah empêcherait de parler des autres tragedies. Ou encore il y aurait une saturation de la memoire de la Shoah. On en parle trop. C’est le fruit d’un lobby juif faisant pression….
La Shoah ne devrait donc plus être un sujet.
Pour nous, aujourd’hui Transmettre la mémoire de la shoah est donc un enjeu militant. Nous nous employons à federer les etudiants pour mettre fin a ces discours qui voudraient faire du travail de mémoire une revendication identitaire et qui balaient d’un revers de main les leçons universels à en tirer. Il nous faut faire comprendre qu’au dela des héritages familiaux et religieux, juifs et non juifs nous devons préserver la mémoire de la Shoah dans notre mémoire collective.
Transmettre ce que ces leçons ont d’universel c’est aussi accepter de faire dialoguer les mémoires C’est ce que nous faisons chaque 7 avril en commémorant le génocide des tutsi. C’est ce que nous faisons en nous rendant mercredi en Turquie avec des arméniens pour la tenue à Istanbul d’une commémoration du génocide des arméniens.
Le soulèvement fut un combat pour la vie, pour la dignité. Au pire de l’enfer, des jeunes hommes et femmes ont défendu leurs valeurs. Ils ont transcendé les heures les plus sombres pour préserver ces valeurs face à la folie du monde.
C’est aussi un signe pour nous étudiants juifs de. France de la lutte contre l’antisémitisme et le racisme qui est malheureusement d’actualité.
Les mouvements neo nazis comme les islamistes radicaux comportent une haine meurtrière qui a coûté la vie à des parents et enfants juifs français il y a si peu.
Nous, étudiants juifs de France, c’est ce que nous retenons. Il nous faut contribuer à inscrire cette histoire. Pour une transmission qui dépasse les peurs. Pour construire une mémoire engagée et non pétrifiée. Pour faire barrage à la haine. Pour faire vivre nos valeurs juives françaises. C’est pourquoi nous sommes là avec vous pour commémorer ce combat.