Que reste t-il de la marche pour l’égalité de 1983 ?
Trente ans après la Marche des Beurs, un sondage dresse l’état de l’opinion sur le racisme. Les Français estiment en majorité que leracisme a augmenté, ils jugent les associations antiracistes inefficaces.
Près de trois quarts des Français considèrent le racisme comme “un danger” pour la société, mais la même proportion ne fait pas confiance aux associations antiracistes pour le combattre, selon un sondage OpinionWay pour la Licra publié lundi. Le racisme est un “danger” pour 74 % des Français et, 59 % jugent qu’il a plutôt augmenté au cours des trente dernières années, selon ce sondage réalisé en vue des universités d’automne de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme du 11 au 13 octobre.
Plus difficile d’être musulman aujourd’hui qu’il y a trente ans
Les sondés font toutefois des distinctions : la majorité estime qu’il est plus difficile d’être musulman qu’il y a trente ans (61 %) ou d’origine maghrébine (56 %). En revanche, elle juge plus facile d’être Noir aujourd’hui (61 %), juif (70 %) ou d’origine asiatique (79 %). L’année de comparaison, 1983, est celle de la Marche pour l’égalité et contre le racisme, dite “Marche des Beurs”. SOS Racismeétait né dans la foulée. Trente ans plus tard, seuls 19 % des sondés disent “avoir entendu parler” de cette Marche.
Les associations antiracistes jugées inefficaces
Si 55 % des Français jugent le rôle des associations antiracistes “important”, elles sont citées après l’école, les médias, le monde du sport et les personnalités politiques. Plus sévère : “74% des sondés disent “mal les connaître”, 86 % se désintéressent de leur action et 70 % les jugent “pas efficaces”. “Nos concitoyens nous envoient un grand coup de pied dans les fesses”, a commenté le président de la Licra Alain Jakubowicz. “Dans les années 80, on était un peu les rois des dîners en ville. Aujourd’hui, il y a un mythe d’associations liberticides, déconnectées des réalités qui pompent l’argent de la société”, a-t-il regretté.
Le racisme a changé de nature
Selon lui, outre “l’effet de mode”, les associations ont commis des erreurs. Elles sont restées “bloquées” sur la grille de lecture des années 80, où “le racisme était substantiellement blanc, d’extrême droite et souvent chrétien” et “le fait d’être noir, juif ou maghrébin classait comme victime”. Or, “les racistes et les antisémites ont changé sur le fond” (nouvel antisémitisme né dans les quartiers) et “la forme” (propagation des messages sur internet).
Crise du militantisme
Les associations souffrent également de la crise du militantisme, et du repli de la société sur elle-même, a-t-il dit, espérant que ce sondage serve à “remobiliser les troupes”. Le sondage a été réalisé en ligne les 2 et 3 octobre auprès d’un échantillon représentatif de 1.003 Français, selon la méthode des quotas.
Midi Libre, Lundi 7 octobre 2013