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Stéphane Hessel compare l’occupation nazie à l’ « occupation sioniste » : la réponse de l’UEJF sur le Plus – Nouvel Obs

Dans un entretien publié dans le « Frankfurter Allgemeine Zeitung » du 21 janvier 2011, Stéphane Hessel compare l’occupation nazie avec l’ »occupation » israélienne en Palestine. Il estime que la « souplesse » de l’occupation nazie, laquelle selon lui « voulait agir positivement », la rend « relativement inoffensive » en regard de la présence israélienne dans les territoires palestiniens.

Jonathan Hayoun lui répond dans une tribune publiée sur Le Plus Nouvel Obs.

MAJ : Stéphane Hessel, qui habituellement ne donne pas de réponse aux personnes qui l’interpellent, a cette fois répondu dans une tribune publiée sur le même média.

 

Stéphane Hessel et l’occupation nazie « inoffensive » : quel indigné est-il vraiment ?

Dans un entretien publié dans le « Frankfurter Allgemeine Zeitung » du 21 janvier 2011, Stéphane Hessel compare l’occupation nazie avec la présence israélienne dans les territoires palestiniens. Il estime que la « souplesse » de l’occupation nazie, laquelle selon lui « voulait agir positivement », la rend « relativement inoffensive » en regard de la présence israélienne dans les territoires palestiniens.

Stéphane Hessel disait : « Si je peux oser une comparaison audacieuse sur un sujet qui me touche, j’affirme ceci : l’occupation allemande était, si on la compare par exemple avec l’occupation actuelle de la Palestine par les Israéliens, une occupation relativement inoffensive, abstraction faite d’éléments d’exception comme les incarcérations, les internements et les exécutions, ainsi que le vol d’oeuvres d’art. »

Comparer présence israélienne et occupation nazie, est-ce pertinent ?

Si donc la présence israélienne dans les territoires palestiniens devait servir d’étalon pour mesurer le niveau de violence de l’occupation nazie en France, cette dernière serait neutre, proche de la norme. Stéphane Hessel procède ainsi à une mise en équivalence de ces deux phénomènes historiques.

Pour que tienne cette comparaison, Stéphane Hessel ne recule devant rien ; pas même devant la tentation de tenir les internements, incarcérations, et exécutions massives des Juifs, des Tziganes, des homosexuels et des opposants politiques pour négligeables. Tout au moins, il opère une analogie entre un fait historique donné et l’occupation nazie à des fins moralistes – pour appuyer la condamnation morale d’Israël – tout en estimant acceptable que le déterminant fondamental de l’immoralité de l’occupation nazie soit tenu en dehors de l’équation.

Ce procédé, en plus de relever d’une malhonnêteté intellectuelle déplorable, implique que, lorsqu’il s’agit d’Israël, les déportations ne représentent plus un argument majeur du jugement moral que nous devons faire aujourd’hui de l’occupation nazie. Pour Stéphane Hessel, Israël brusque le sens éthique plus fortement que ne devraient le faire les incarcérations, les internements et les exécutions – et, parce que tout cela revient au même, le vol d’oeuvres d’art.

Mais pourquoi Hessel en veut-il tant à Israël ?

Comment est-il parvenu à ce stade où les valeurs se confondent, où les repères s’effacent ? Dans cette interview, demeurée confidentielle pendant trop longtemps, les références communes cèdent le pas devant la confusion des esprits, et les péroraisons sont aussi fallacieuses que pernicieuses.

Grand résistant, Stéphane Hessel a concentré sa formidable énergie sur l’État d’Israël. Sa brochure fameuse, « Indignez-vous! », donnait pour principaux motifs d’indignation légitime le capitalisme libéral – soit – et Israël. Les bonnes âmes auront eu raison de penser que l’Indignation héroïque du héraut des indignés tirait sa source de la misère – bien évidemment réelle – des Palestiniens. Les militants de l’UEJF ne manquent pas non plus d’être interpellés lorsqu’ils se rendent en Cisjordanie. Mais pour Stéphane Hessel – grand humaniste – ce n’est pas sur le trouble palestinien qu’achoppe la conscience morale. Stéphane Hessel – grand ami des Palestiniens – ne se préoccupe pas tant des Palestiniens que de la « tyrannie » israélienne.

L’État juif, voilà l’ennemi ! L’entité sioniste est coupable de tous les maux, à tel point qu’elle supporte, dans la bouche de Stéphane Hessel, la comparaison avec l’icône du mal universel, l’occupant nazi. Le nazisme et la Seconde Guerre mondiale ont structuré la conscience européenne, et façonné les idées de bien et de mal qui ont cours depuis 1945. Ce que propose Stéphane Hessel n’est autre qu’un revirement radical du manichéisme occidental. Le nazisme n’était pas si terrible, puisque les vichyssois savaient apprécier le théâtre. Les loisirs favoris de la bourgeoisie parisienne sont le point d’Archimède par lequel Hessel renverse les valeurs. Israël aurait détrôné le nazisme de sa place de représentant du mal universel.

Cette interview révélée à l’opinion française, plusieurs mois après sa parution, mérite que soit reposée la question « de quoi Hessel est-il le nom ? ». L’indigné de tous les indignés a basculé en dehors du bon sens. Cette grande figure de la conscience morale universelle, après un long parcours – parcours glorieux s’il en est – s’est trouvée au carrefour de l’humanitarisme et du révisionnisme d’extrême-droite.

Stéphane Hessel a choisi sa voie. Il a pris ses responsabilités. Il porte le poids de ses engagements. Il porte désormais le poids insupportable d’un faux pas qui trahit la perdition éthique d’un indigné redoutable.

Jonathan Hayoun, président de l’UEJF

Le Plus/Nouvel Obs’, 12 juillet 2012

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