Le mot “délégitimation” est omis, de manière moralisatrice, des initiales du BDS mais constitue sans aucun doute la base et l’ultime objectif de cette campagne.
Par Moshe Arens
“Des bâtons et des pierres peuvent briser mes os, mais les mots ne pourront jamais me faire du mal” ; telles sont les paroles d’une vieille comptine dont le message est qu’il ne faut pas prendre trop au sérieux des paroles vexantes. Mais il y a un mot, qui, quand il s’adresse à une victime potentielle, bien que ne pouvant en lui-même briser aucun os, a le pouvoir de servir de préambule à des pierres et à des os brisés, des cranes fracturés, des coups de feu à la tête, des chambres à gaz et l’extermination. Ce mot est délégitimation. C’est quelque chose que les juifs, au fils des générations ont bien appris et dont leurs ennemis ont appris à se servir, alors que son impact est fatal. Il s’agit de la déclaration selon laquelle la saison de la chasse contre la victime de cette même délégitimation est ouverte.
Pendant des centaines d’années, les juifs ont fait l’objet d’une délégitimation, alors qu’on les qualifiait de meurtriers de Jésus, affirmant par cela qu’ils méritaient d’être punis pour crime de déicides. En tant que tels, ils n’ont pas eu le droit à une protection prévue par la loi telle qu’accordée à d’autres. Cette délégitimation a donné lieu à des déportations et à des pogroms. Le premier pas institué par l’Allemagne de Hitler dans le cadre de sa campagne contre les juifs allemands fut de les délégitimer en niant leurs droits civils, en les licenciant de postes gouvernementaux et universitaires, et en leur interdisant de se livrer à leurs professions. Plus tard, sont arrivés la confiscation de bien, le boycott et autres sanctions économiques, les déportations, les ghettos, les exécutions de masse et les chambres à gaz.
La campagne de “Boycott, Désinvestissement et Sanctions” contre Israël représente une tentative flagrante de délégitimiser d’état juif. Le mot délégitimation est omis, de manière moralisatrice, des initiales du BDS mais constitue sans aucun doute la base et l’ultime objectif de cette campagne. Cela signifie-t-il que tous ceux qui prêtent leur soutien à cette campagne destinée à délégitimiser l’état d’Israël sont antisémites ? Ses leaders et nombreux d’entre ceux qui le promeuvent le sont, et ils sont rejoints par les gens que Lénine qualifiait d’ «idiots utiles», qui sont persuadés qu’ils ne font que prêter leur soutien à une protestation contre une certaine politique du gouvernement israélien, «l”occupation israélienne» de la Judée –Samarie.
Peut-on supposer que si Israël se retirait de la Judée-Samarie, ils deviendraient des supporters enthousiastes de l’état juif ? Ou qu’ils continueraient à soutenir le BDS, à protester contre la manière dont Israël traite les bédouins, contre le statu des citoyens arabes en Israël, ou tout autre politique d’action du gouvernement israélien qui n’est pas à leur goût? Ils ont suffisamment de plaintes contre Israël, qui, selon eux, doit recevoir des dictats par le biais du boycott, du désinvestissement et de sanctions.
Il est difficile de ne pas parvenir à la conclusion qu’ils s’opposent tout simplement à l’existence d’un état juif au Moyen-Orient. Ils constituent une partie d’une campagne courante contre l’état juif, se basant sur ce que le Premier Ministre canadien, Steven Harper, a justement qualifié des trois D : la Démonisation, la Délégitimation et le Double Standard, une campagne qui ne se limite pas aux frontières de l’armistice de 1949. Si cela n’est pas de l’antisémitisme, alors qu’est-ce que c’est ?
Dans la première tentative d’écraser Israël par la force, les armées des états voisins avaient reçu de l’aide de la part des armées d’autres pays arabes. La campagne de terrorisme palestinien, qui aspirait à fragmenter la société israélienne, avait reçu, après la Guerre de Yom Kippur, de l’aide de la part de gangs terroristes internationaux comme le Baader-Meinhof et l’Armée Rouge Japonaise. La campagne de BDS est la troisième vague d’assaut qui a été lancée contre Israël depuis sa création en mai 1948. Les palestiniens qui mènent cette campagne ont réussi à mobiliser des antisémites du monde entier et un groupe de partisans qui les suivent. Il est pratiquement évident que leur ambition d’affamer Israël jusqu’à ce qu’elle se soumette par les moyens de boycotts et de sanctions, ne parviendra pas à ses fins. L’économie israélienne est trop forte et trop attrayante pour les investisseurs étrangers pour être soumise par de telles tentative de la punir sur le plan économique. Les banques, les fonds de retraite et les institutions universitaires qui offrent leur soutien à cette campagne découvriront rapidement qu’ils seront ceux qui subiront des dommages économiques.
Source : Haaretz, 12 février 2014